Quand le lait coule trop vite et trop fort : repérer les causes et gérer son allaitement

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Vous regorgez de lait ? Vous arrosez votre environnement à chaque tétée ? Vos seins débordent en permanence comme en pleine montée de lait ? Vous êtes peut-être dans le cas d’une hyperlactation ou d’un REF (réflexe d’éjection fort). Si les femmes sont abreuvées de conseils pour stimuler leur lactation, elles se retrouvent plus démunies quand elles font face à un trop-plein de lait. Même si cela gêne votre allaitement et compromet votre vie sociale, ce n’est pas une fatalité. Découvrez comment repérer l’origine du problème et trouver des solutions.

Cet article est basé sur mes échanges avec Vanessa Letter Lemaire (consultante en lactation IBCLC) dans lépisode 14 de Milkshaker.

Quels sont les signes de l’hyperlactation et du réflexe d’éjection fort ?

On parle d’hyperlactation quand la quantité produite est largement supérieure aux besoins du nourrisson. Dans le cas du REF, le lait, tel un geyser, arrive trop vite et trop puissant dans la bouche du bébé en raison d’un système de livraison trop efficace, et le bébé a des difficultés à le gérer. Les deux peuvent coexister ou non.

Reconnaître une hyperlactation

Chez la maman, cela se traduit par des seins souvent tendus et douloureux, d’éventuelles fuites de lait en permanence, ou par des engorgements / mastites de façon récurrente. Le bébé, quant à lui, présente une déglutition très rapide et bruyante en raison de la vitesse et de la quantité du transfert de lait. On peut également observer le lait qui déborde de sa bouche ou un nourrisson qui se retire du sein à cause du trop-plein. Ce dernier peut montrer un inconfort digestif comme des régurgitations par trop plein de lait ou encore des selles vertes causées par une quantité trop importante de lactose.

Repérer un REF

Parfois, on voit nettement le « geyser de lait » sortir du sein, mais cela n’est pas forcément le cas. Dans les deux situations, deux signes chez le bébé alertent :

  • Son comportement : il s’agite, semble boire très vite, tousse, s’étrangle, se retire du sein durant la tétée voire le refuse. Il avale également facilement de l’air en tétant.
  • Des troubles digestifs : rots, régurgitations, parfois selles vertes mousseuses et explosives.

La maman peut de son côté ressentir des douleurs aux mamelons. Ces dernières sont causées par des pincements du bébé qui tente de réguler le flux de lait.

Quelles sont les causes de l’hyperlactation et du REF ?

Ces difficultés de lactation peuvent être simplement physiologiques. Dans ce cas, il faudra s’adapter et appliquer des principes pour les contrôler. Cependant, des facteurs extérieurs peuvent l’induire et leur traitement permet de retrouver un allaitement serein.

Des raisons médicales 

Le SOPK (syndrome des ovaires polykystiques) dans certains cas, l’hyperthyroïdie ou un prolactinome peuvent être à l’origine d’une hyperlactation. En ce qui concerne le REF, même si cela n’a pas encore été prouvé scientifiquement, les protéines de lait de vache (PLV) sont soupçonnées de pouvoir l’induire. 

Une conduite de l’allaitement favorisant une trop grande production 

Les mamans reçoivent beaucoup de conseils pour activer leur lactation, mais dans le cas d’une hyperlactation, cela provoque une hyperstimulation qui va l’aggraver. Ainsi, l’utilisation de galactogènes, l’utilisation prolongée de coques ou coupelles d’allaitement par exemple, peuvent surstimuler la glande mammaire.

Des troubles de la succion chez le bébé qui gênent les tétées

Le corps des femmes est une formidable machine conçue pour nourrir leur enfant. Si la tétée n’est pas efficace, cela gêne la production et la transmission de lait. Le corps va alors compenser et se mettre en mode « usine à lait ». Il coule donc plus vite et plus fort sans que le bébé ait à fournir d’efforts.  

Ces troubles de la succion peuvent être liés :

  • À des blocages mécaniques ne permettant pas une bonne ouverture de bouche et une mobilité satisfaisante de la cavité buccale et de la langue.
  • À la présence de freins restrictifs buccaux.
  • À une naissance prématurée, les mécanismes de succion et leur coordination avec la déglutition se mettant en place tard.
  • À une hypotonie chez le bébé
  • À des blocages mécaniques comme un torticolis. Si le REF n’apparaît que sur un seul sein ou est présent sans hyperlactation, il est probable que le bébé souffre de tensions musculaires. 

Dans tous les cas, la première réponse est de faire le point avec une consultante en lactation qui combinera questionnements, observations et analyses pour vous aider à trouver la source des difficultés. Elle pourra alors vous conseiller et vous orienter vers d’autres professionnels compétents en fonction de ses conclusions. Une séance d’ostéopathie est souvent une solution clé pour libérer votre bébé de ses restrictions de mobilité.

Si vous avez vécu une hyperlactation ou un réflexe d’éjection fort, vous vous demandez légitimement si vous y serez confronté pour votre/vos prochain(s) enfant(s). En dehors des causes médicales évoquées, il faut garder en tête que chaque allaitement est différent et que vous ne ferez pas forcément face aux mêmes difficultés. 

Hyperlactation et REF : comment gérer et réguler ?

Lorsque les conséquences en termes d’inconfort et d’adaptation à la vie sociale sont présentes, il est important d’agir pour favoriser la poursuite sereine de l’allaitement. De plus, cela permet d’éviter des complications pour la maman et le bébé (mastites, troubles digestifs…)

Notez que la première chose à faire est d’évaluer la succion de votre bébé, rapprochez vous d’un professionnel formé. Voici des conseils pour contrôler le phénomène.

Eviter de surstimuler la production de lait

En cas d’hyperlactation, mettre de côté les coquilles de recueil qui stimulent les seins en permanence, essayer de ne pas consommer trop d’aliments galactogènes et ne pas abuser du tire-lait. Proposer le même sein sur plusieurs tétées peut s’avérer utile et d’autres protocoles ou plantes peuvent faire diminuer votre lactation, mais la situation doit en amont être évaluée par une personne spécialisée.

Soulager les engorgements de l’hyperlactation

L’expression manuelle, que l’on peut apprendre avec une consultante en lactation, est à privilégier. En effet, elle permet de drainer de façon plus ciblée et plus précise que le tire-lait et de s’arrêter au moment où le confort au niveau de la poitrine est revenu sans trop stimuler.

Assouplir l’aréole avant la tétée

Cela permet de favoriser une bonne mise en bouche du mamelon par le bébé.

Allaiter dès les premiers signes d’éveil du bébé

Les yeux qui bougent sous les paupières, les mains portées à la bouche, la tête qui se tourne à la recherche d’un mamelon sont des indicateurs que votre nourrisson est prêt à téter. En effet, de cette manière, la mise au sein s’effectue dans de bonnes conditions avant que le tout-petit pleure et s’irrite. La tétée sera ainsi plus calme.

Pratiquer des positions d’allaitement qui inhibent le REF

Il s’agit des postures dans lesquelles le bébé est sur le sein pour contrer les effets de la gravité. Ainsi les installations allongées ou semi-allongées sont à préférer. Je vous invite ainsi à découvrir le biological nurturing.

Avoir des langes à proximité pour éponger les fuites 😉

Faire des pauses lorsque le bébé s’énerve

Pendant ces interruptions, parler et rassurer le bébé et lui faire faire un rot si nécessaire pour lui permettre d’évacuer l’air ingéré.

Dans le cas d’un REF :

  • donner le même sein plusieurs fois de suite

Cela permet de le rendre plus souple. Pendant ce temps, l’autre sein qui n’est pas stimulé (ou à minima désengorgé par expression manuelle) freinera sa fabrication.

  • diminuer ou stopper la consommation de protéines de lait de vache peut s’avérer utile pour certaines mères.

Enfin, vous pouvez réaliser des dons au lactarium. Votre surproduction profite ainsi aux prématurés qui avant un certain âge ne peuvent consommer QUE du lait matenel. L’épisode Hors série 1 du podcast vous dit tout sur le sujet !

Ces conseils ne se substituent pas à l’examen d’un professionnel qui pourra établir un diagnostic et vous accompagner en fonction de votre situation personnelle.

J’espère que cet article vous permettra d’appréhender votre hyperlactation et réflexe d’éjection fort de façon plus fluide. Repérer la cause est la clé : votre corps ne fait que compenser des déséquilibres pour combler les besoins de votre bébé. N’hésitez pas à contacter une consultante en lactation IBCLC pour vous aider dans ces moments compliqués. Je vous souhaite de retrouver un allaitement confortable et satisfaisant !