Le sevrage est un sujet important lorsque l’on parle d’allaitement. Et comme dans tout ce qui concerne le maternage, il n’y a pas de recette magique ou de protocole scientifique tant chaque couple maman/enfant est singulier avec son propre contexte… Les interrogations sur les types de sevrage d’allaitement sont nombreuses et je vais tenter de répondre aux questions que vous vous posez autour de votre projet de sevrage.
Cet article est basé sur mes échanges avec Céline Bourganeuf, consultante en lactation IBCLC, dans l’épisode 31 de Milkshaker.
Quels sont les types de sevrage d’allaitement ?
En fonction de l’âge de l’enfant et des conditions, on différencie :
Sevrage induit ou naturel
On évoque un sevrage induit lorsqu’il est à l’initiative de la maman ou provoqué par une raison médicale. Avant deux ans, il s’agit toujours d’un sevrage dirigé.
Après 2 ans, on peut parler de sevrage naturel ou induit selon les circonstances. On observe un sevrage naturel lorsque le bambin (entre 2 et 5 ans) commence à dire non ou à ne plus réclamer. Il se désintéresse petit à petit, mais il peut se remettre à téter à certaines périodes (maladie par exemple).
Sevrage partiel ou complet
Lorsque l’allaitement au sein se poursuit la nuit, mais qu’il y a un relais de préparation commerciale pour nourrisson la journée, on parle de sevrage partiel. Il est total quand toutes les tétées sont supprimées.
Le sevrage va-t-il favoriser le sommeil de mon bébé ?
Selon une croyance bien ancrée, les enfants allaités dorment moins bien ! Il s’agit d’une idée reçue ! En effet, en fin de journée, ils bénéficient via le lait maternel de deux hormones, le tryptophane et la mélatonine, qui favorisent l’entrée dans un sommeil profond. Le phénomène est identique pour la maman, ce qui lui permet de mieux récupérer sur un temps plus court de repos.
Quelles sont les causes de sevrage induit ?
Plusieurs raisons peuvent conduire une mère à provoquer le sevrage de son bébé. Tout d’abord, il peut s’agir d’un choix avec lequel elle est alignée pour retrouver son corps, une certaine liberté, ou parce qu’elle ne souhaite plus poursuivre cette aventure. Cependant, le sevrage peut lui être imposé : pour des motifs médicaux, par une pression familiale ou sociale qu’elle subit, lors de la survenue d’une grossesse. La femme peut également se trouver dans une situation de sevrage « de désespoir », car elle reprend le travail ou souffre d’une baisse de lactation non désirée.
Peut-on sevrer son enfant du jour au lendemain ?
Il est tout à fait déconseillé de sevrer son bébé soudainement. Cela engendre des engorgements et son cortège de complications potentielles. Par ailleurs, du point de vue de l’enfant, cela peut être traumatisant et provoquer une angoisse d’abandon surtout s’il s’agit d’un bambin. Lorsque pour des raisons médicales, ce sevrage brutal est nécessaire, il est important de beaucoup parler au petit et de continuer à l’accompagner de façon proximale.
Quels sont les risques d’un sevrage imposé ?
Si la mère se sent obligée de sevrer, des difficultés peuvent survenir. Le bébé de son côté peut manifester un refus, car il perçoit que sa maman n’est pas sereine avec cet arrêt. Pour cette dernière, la dissonance entre le corps et l’esprit peut entraîner des engorgements. Il est donc important d’interroger les femmes sur le contexte du sevrage. L’idée est de créer un environnement propice pour que cela se passe paisiblement et que les mères soient fermes dans leur propre choix.
Que faire avant d’envisager les différents types de sevrage d’allaitement ?
Le prérequis essentiel est de se poser la question de ce qui nous conduit à vouloir arrêter l’allaitement. L’idéal est de réaliser un projet de sevrage qui reprend ces éléments et permet de noter ses souhaits (type de sevrage, timing, besoin de relais…).
Peut-on garder uniquement les tétées du matin et du soir ?
Ce n’est pas difficile en soi, mais il faut accepter que pour maintenir la lactation, le bébé tète beaucoup le soir et la nuit. Il faudrait donc idéalement donc conserver un allaitement à la demande sur ces périodes. Dans un second temps, une fois ce nouveau rythme en place, il sera possible de poursuivre avec ces seules tétées. Notez que chaque couple maman bébé est différent et chaque lactation est singulière : diminuer drastiquement le nombre de tétées peut très bien fonctionner pour certaines et induire une baisse de lactation importante pour d’autres.
Doit-on arrêter l’allaitement en cas de traitement médicamenteux ?
La plupart des professionnels de santé n’ont pas les informations sur la compatibilité des traitements avec l’allaitement et conseilleront dans le doute de ne plus donner votre lait à votre enfant. En réalité, il existe de nombreux médicaments qui permettent de prolonger l’allaitement. Pour cela, le CRAT et E lactancia sont des ressources précieuses que vous pouvez transmettre à votre médecin.
De plus, même en cas de traitement incompatible, il est rare que cela doive se faire du jour au lendemain, cela laisse le temps de mettre en place le sevrage.
Quels professionnels peuvent me conseiller et me guider pour le sevrage de mon enfant ?
Les consultantes en lactation IBCLC, les personnes ayant le DIULHAM ont pour rôle d’accompagner l’allaitement sous toutes ses formes. Elles sont donc également spécialisées pour votre sevrage. Elles soutiennent l’élaboration d’un projet de sevrage afin d’aider les mères à y voir plus clair sur leurs souhaits.
Que faire si mon bébé refuse le biberon ?
Le petit peut s’opposer au biberon dans le cas d’un sevrage imposé lorsqu’il ressent que sa mère n’est pas en accord total. Il peut aussi s’agir d’une problématique de succion ou d’une difficulté à s’adapter à ce nouveau mode de nutrition. Quelle que soit la raison :
- Il est important d’en parler et de s’accorder avec la ou les personnes en charge de la garde du bébé.
- Des contenants alternatifs peuvent être testés et utilisés.
- La consultante en lactation pourra vous orienter vers les professionnels de son réseau pour comprendre le problème et trouver des solutions.
Peut-on réussir un sevrage d’allaitement seule ?
Parfois, cela se fait très naturellement et la maman parvient à gérer le sevrage en autonomie. En revanche, comme je le répète souvent, lorsque les questions et les craintes s’empilent ou que des problèmes se posent déjà, il faut s’adresser à une personne formée pour vous accompagner. Une seule consultation peut suffire.
Pourquoi une grossesse peut-elle induire un sevrage ?
Si la mère le souhaite, une nouvelle grossesse est compatible avec un allaitement. Cependant, il y a une modification de la consistance et du goût du lait, car la maman produit à nouveau du colostrum, plus salé. De ce fait, le petit peut faire la grève, mais cela est transitoire. Du côté de la maman, la grossesse peut entraîner une aversion qui peut la conduire à vouloir arrêter l’allaitement.
Qu’est-ce que l’allaitement à l’amiable ?
Lorsque le sevrage n’est pas souhaité, mais que le côté « open-bar » devient oppressant pour la maman, l’allaitement à l’amiable est une option à partir de 6 mois. Entre 6 et 12 mois, il s’agira d’abord de pouvoir retarder certaines tétées, si vous n’êtes pas disponible immédiatement. À partir de 12 mois, l’enfant est en âge d’expérimenter la frustration et d’apprendre à la gérer, et vous pourrez refuser les tétées non désirées. L’important est de favoriser votre confort et de rester en harmonie avec vos choix sans culpabiliser.
Qu’est-ce qui peut compliquer un sevrage ?
Des troubles de la succion ou des troubles de l’oralité peuvent perturber la mise en place du sevrage. En effet, pour ces enfants qui se nourrissent par petites quantités, l’allaitement au sein est souvent une meilleure solution. Si on souhaite sevrer, il faut s’assurer que les besoins nutritifs sont couverts. De plus, ces bébés peuvent être plus dépendants à la fonction auto apaisante du sein, car ils peuvent montrer d’avantage de difficulté à s’apaiser sans la succion.
Comment s’y prend-t-on concrètement ?
La démarche dépend du type de sevrage d’allaitement que vous souhaitez mettre en place.
- Si vous reprenez le travail et que vous souhaitez conserver un allaitement exclusif en tirant votre lait, il faut prendre en compte votre temps d’absence dans la journée. Cela vous permet de savoir le nombre d’expressions au tire-lait nécessaires pour maintenir votre lactation.
- Si vous voulez mettre en place un sevrage partiel, le principe est de limiter les tétées sur une quinzaine de jours pour introduire les biberons (ou un autre contenant) et restreindre les engorgements. Le timing de suppression des tétées est dépendant de chaque femme et de son état d’esprit. En effet, cela influe sur les hormones et donc la lactation.
- Si vous optez pour un sevrage complet, la réduction des tétées est appliquée le jour et la nuit. Si vous désirez arrêter votre lactation, il faut abandonner progressivement les mises au sein même si c’est juste des tétées câlins, car celles-ci stimulent également la production de lait.
Comment sevrer un bambin ?
Avant d’entamer ce sevrage, l’idéal est de faire le point avec soi-même et avec son conjoint pour savoir ce qui ne fonctionne plus : le nombre, la durée, les horaires, le couchage, le sommeil, la relation de couple, le besoin de retrouver son corps…
Ensuite, vous pouvez appliquer les conseils suivants :
- Allez-y progressivement en distinguant les tétées difficiles pour la maman et celles indispensables pour l’enfant.
- Projetez dans le calendrier l’arrêt des tétées et parlez-en à votre bambin pour que tout le monde puisse s’y préparer.
- Expliquez à votre enfant plusieurs fois la situation avant de vous lancer.
- Choisissez le bon moment : commencer juste avant la reprise du travail n’est pas forcément une bonne idée, mais c’est à vous d’imaginer quelle sera l’occasion idéale en fonction de votre contexte personnel et professionnel.
- Faites équipe avec votre conjoint qui devra être soutenant et prendre le relais, notamment pour consoler le petit et lui proposer des alternatives au sein sans qu’il soit en contact direct avec l’odeur du lait.
- Procédez par étapes : il sera peut être difficile de mettre en place conjointement le sevrage et l’arrêt du cododo par exemple. Il faut être patient.
J’espère que ces réponses vous éclaireront sur les types de sevrage d’allaitement et vous aideront à déterminer vos souhaits pour vous et votre enfant. Si vous ne devez retenir que 3 conseils :
- Faites-vous confiance
- Prenez le temps d’élaborer et mettre en place votre projet de sevrage
- Faites-vous accompagner par une consultante en lactation IBCLC pour vous soutenir et vous guider
Si vous souhaitez entendre des témoignages, la plupart des épisodes de Milkshaker évoquent le sevrage, car il fait partie intégrante de l’allaitement, mais trois épisodes y sont consacrés, en mode immersif avec Ophélie qui raconte son sevrage au jour le jour.